La Samedi 19 avril 2025, une nouvelle polémique a secoué le milieu du rap ivoirien à la suite de la prestation remarquée de Himra au Festival des Musiques Urbaines d’Anoumabo (Femua). Un internaute, connu sous le pseudo « Bazarhoff Trône » et se revendiquant membre de la « Conspiration » (groupe de soutien à DIDI B), a publié un commentaire injurieux visant l’épouse de Suspect 95, provoquant une vague d’indignations.
Contexte : une photo qui ravive les tensions
La photo en question, publiée par Authentique Fortographie, montrait l’épouse de Suspect 95 portant un badge du staff de Himra lors du Femua 17.

Ce cliché, anodin en apparence, a suscité des réactions virulentes sur les réseaux sociaux, notamment parmi les fans de Didi B et de Himra, dans un contexte de rivalité déjà tendue entre les deux rappeurs. L’implication de l’épouse de Suspect 95, une figure respectée dans le milieu artistique ivoirien, dans l’équipe de Himra a été perçue par certains comme une provocation ou une prise de position dans le clash entre les deux artistes.
Le commentaire de « Bazarhoff Trône », membre autoproclamé de la « Conspiration » (groupe de fans soutenant Didi B), contenait des insultes visant directement l’épouse de Suspect 95. Bien que le contenu exact du commentaire ne sera pas rendu public dans notre article par respect pour la femme, il a été jugé suffisamment offensant pour déclencher une réaction en chaîne.
Des internautes, principalement des supporters de Himra, ont capturé ce commentaire et l’ont partagé massivement sur les réseaux sociaux, notamment sur Facebook, en accusant Didi B et ses fans d’encourager des comportements irrespectueux. Un post sur X, publié le 19 avril, ironisait ainsi :
Les fans bien éduqués sont en train d’insulter la femme de Suspect 95 ? Pourquoi ? Parce que hier, elle était du staff de Himra. On ne va jamais voir madame Diba Diallo faire un communiqué pour éduquer ses larbins et dénoncer la violence.
Cette indexation hâtive de Didi B, avant même qu’il ne s’exprime, illustre la polarisation extrême entre les deux camps de fans, les « Chétté » (supporters de Himra) et la « Conspiration » (fans de Didi B).
La rivalité Himra-Didi B : un terrain fertile pour les dérapages
Cette polémique s’inscrit dans une rivalité de longue date entre Himra et Didi B, qui divise la scène rap ivoirienne depuis plusieurs mois. Himra, étoile montante du Drill ivoirien, s’est imposé avec des titres comme Ganjaman et Jeune & Riche, revendiquant le titre de « nouveau roi du rap ivoire ». Cette affirmation, lancée fin 2024, a été perçue comme un défi direct à Didi B, membre emblématique de Kiff No Beat et pilier du rap ivoirien, connu pour son style mêlant dirty south et coupé-décalé.
Suspect 95, proche de Didi B, s’est retrouvé mêlé à ces querelles, notamment après avoir accusé Didi B d’acheter des vues sur YouTube pour son clip Go en février 2025, une déclaration qui avait déjà divisé les fans. La présence de son épouse dans le staff de Himra au Femua a donc été interprétée par certains comme un signe de soutien à Himra, ravivant les spéculations sur des alliances dans le milieu.
La réaction de Suspect 95 : un appel à la justice
Le 19 avril, la rappeur Suspect 95 a réagi avec fermeté sur sa page Facebook, dénonçant les attaques contre son épouse :
Je suis tombé sur une multitude de commentaires de haine et de mensonges concernant mon épouse et je suis déçu. À quel moment on se dit je vais traiter la mère des enfants de quelqu’un de tous les noms juste pour des likes ?? En plus, quelqu’un qui ne fait rien de mal, juste son travail honnêtement…
Il a promis des suites judiciaires, menaçant :
Mais toi je vais te retrouver et on va aller jusqu’au bout… toi et tous les autres !
En taguant la Direction Générale de la Police Nationale de Côte d’Ivoire, Suspect 95 a signalé son intention de poursuivre l’auteur du commentaire pour cyberharcèlement, une pratique de plus en plus dénoncée en Côte d’Ivoire.
Femme de Suspect 95 insultée, Didi B prend ses distances
Environ deux heures plus tard après la publication de Suspect 95, Didi B a publié un message sur ses réseaux sociaux, condamnant l’incident et appelant au respect :
Il y a un minimum de respect qu’on se doit de garder, même dans le game ou les rivalités artistiques. Insulter la femme de Suspect 95, ce n’est pas défendre qui que ce soit, c’est juste un manque d’éducation et c’est se ridiculiser en public. Ce genre de comportement n’a aucune valeur.
Il a insisté sur l’inacceptabilité de s’attaquer à une personne extérieure au conflit :
S’attaquer à une femme qui n’a rien demandé, c’est prouver qu’on manque d’arguments, de principes, et de dignité. […] Je ne valide pas et je ne validerai jamais ce genre d’acte. Diyilem.
Cette prise de position rapide semble avoir été motivée par l’indexation de Didi B par les internautes, qui l’ont accusé d’être indirectement responsable des agissements de ses fans. En se désolidarisant clairement de l’incident, Didi B a cherché à apaiser les tensions et à réaffirmer son engagement pour un débat artistique respectueux.
Une polémique révélatrice des dérives des fans
Cet incident met en lumière les excès des communautés de fans dans le rap ivoirien. La « Conspiration », bien que soutenant Didi B, n’est pas un groupe structuré, et des individus comme « Bazarhoff Trône » agissent souvent de manière autonome, alimentant les conflits sans représenter officiellement l’artiste. De même, les « Chétté », fans de Himra, ont contribué à l’escalade en amplifiant le commentaire injurieux pour accuser Didi B.
Comme l’a noté l’arrangeur Bebi Philip en janvier 2025, cette rivalité, bien que bénéfique pour la visibilité du rap ivoirien, doit rester positive :
Je vois que c’est positif parce que ça nous fait parler de rap en ce moment. Tant qu’il y a quelque chose de positif à gagner, c’est bien.
Cependant, des incidents comme celui du 19 avril montrent les risques de dérapages lorsque les rivalités artistiques débordent sur la sphère personnelle. La polarisation entre les deux camps, exacerbée par les réseaux sociaux, menace de diviser durablement la scène rap ivoirienne, au détriment de son unité.
Vers une résolution ?
En impliquant les autorités, Suspect 95 pose un précédent dans la lutte contre le cyberharcèlement dans le milieu artistique ivoirien. Si aucune information n’indique encore si des poursuites ont été engagées, cette affaire pourrait inciter les artistes et leurs fans à plus de retenue.
Himra, Didi B, et Suspect 95 ont déjà prouvé leur capacité à mettre de côté leurs différends, comme lors d’un stage musical au Nigeria en avril 2025, où ils ont travaillé dans une ambiance professionnelle. Cet incident pourrait être l’occasion pour les trois artistes de renouveler leur appel à l’unité, afin que le rap ivoirien continue de briller par sa créativité plutôt que par ses conflits.